Février 2024
La LFSS pour 20201 a posé le principe d’information des déclarants des contrôles métiers exercés par les organismes de protection sociale à la réception des DSN. En cas d’anomalie, les déclarants sont tenus de les corriger lors de l’échéance déclarative la plus proche. A défaut de correction, la LFSS pour 2020 avait posé le principe d’une substitution des données déclarées par les organismes de recouvrement. La LFSS pour 20242 a remis le sujet au goût du jour, en prévoyant une interlocution contradictoire entre l’organisme de recouvrement et le déclarant à définir par décret à paraitre avant que l’organisme de recouvrement substitue les données en DSN. Le décret définissant cette procédure contradictoire a été publié au Journal Officiel du 31 décembre 2023.
Le décret n°2023-1384 du 29 décembre 2023 relatif aux modalités de vérification et de correction des déclarations sociales nominatives vient détailler la procédure de signalement des anomalies dans les DSN des employeurs par les organismes de recouvrement et la procédure qui pourra être mise en œuvre par l’organisme de recouvrement en l’absence de correction de la part du déclarant.
Il entre en vigueur le 1er janvier 2024.
Décret n°2023-1384, art 4.
Remontées d’anomalies
Les déclarants sont informés des résultats des contrôles effectués par les organismes destinataires de la DSN. Les administrations et organismes destinataires de la DSN doivent transmettre les résultats des vérifications d’exhaustivité, de conformité et de cohérence des données aux organismes de recouvrement (Urssaf ou MSA ou CGSS).
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc ; Soc. art R. 133-14-2, I
En cas d’anomalie, le déclarant doit, soit corriger sa DSN, soit contester une anomalie injustifiée.
En cas d’inaction du déclarant, l’organisme de recouvrement (Urssaf ou MSA ou CGSS) pourra alors effectuer les corrections lui-même, tout en tenant compte des éventuelles anomalies remontées par d’autres organismes ou administrations destinataires des données DSN (par exemple l’Agirc-Arrco ou la DGFiP). C’est la DSN de substitution.
Séc. Soc. art L. 133-5-3-1 et L. 133-5-4
1 : Loi n°2019-1446 du 24 décembre 2019, art. 18, II, 3°
2 : Loi n°2023-1250 du 26 décembre 2023, art 13, I, 13°
Les organismes de recouvrement (Urssaf ou CGSS ou MSA) sont tenus de mettre à disposition des déclarants un compte- rendu métier (dit CRM) mensuel – à terme unique – précisant :
- Les données présentées en anomalie et la nature de l’anomalie,
- Le cas échéant, la correction proposée pour chacune d’elle,
- Et le montant des cotisations et contributions dues après la prise en compte de la
Info : Le décret indique que le compte-rendu métier est enrichi :
- depuis le 1er janvier 2024, du décompte des effectifs et du taux de prélèvement à la source applicable (décret n°2023-1384, art 1er, 3°, b) ; C. séc. soc. art. R. 133-13, V modifié)
- des anomalies constatées dans les DSN antérieures à celle du mois en cours et qui n’ont pas été corrigées (décret n°2023-1384, art 1er, 3°, b) ; C. séc. soc. art. R. 133-13, V modifié)
- A compter d’une date fixée par arrêté à paraitre et au plus tard le 1er janvier 2028, des taux de la cotisation ATMP et versement mobilité (décret n°2023-1384, art 1er, 3°, b) et art 4 ; C. séc. soc. art. R. 133-13, V modifié)
Le décret laisse jusqu’au 31 décembre 2027 le soin aux organismes destinataires de la DSN de transmettre les comptes-rendus métiers par tout moyen. Autrement dit, jusqu’au 31 décembre 2027, les anomalies sont remontées par chaque organisme destinataire de la DSN, indépendamment les uns des autres. A partir de 2028, les CRM devront faire l’objet d’un retour dit normalisé (selon la norme NEORES) et unique, via l’Urssaf ou CGSS ou MSA, pour permettre aux employeurs une meilleure exploitation des corrections. Des travaux seront menés avec les organismes et le GIPMDS à ce sujet (décret n°2023-1384, art 4, II).
Information de l’employeur sur la correction à effectuer
Lorsque le déclarant réceptionne ce compte-rendu, il est tenu :
- soit de corriger les données présentant une anomalie lors de l’échéance déclarative la plus proche, sans descendre à moins de 30 jours à compter de la notification du compte-rendu,
- soit s’opposer de façon motivée à ces corrections dans le même délai pour éviter la correction forcée par l’organisme de recouvrement.
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc. Soc. art R. 133-14-2 nouveau
Info : Par exemple, si les corrections sont notifiées le 15 février, l’employeur doit effectuer les corrections (ou s’y opposer de manière motivée) non dans l’échéance du 5 ou 15 mars.
Absence de correction de la part de l’employeur
Si le déclarant ne corrige pas sa DSN dans les temps, sans s’être opposé aux corrections proposées de façon motivée, les Urssaf, CGSS et MSA pourront corriger elles-mêmes la DSN concernée, qui sera alors adressée à l’ensemble des destinataires classiques de la DSN.
La déclaration effectuée par l’Urssaf, CGSS ou la MSA se substituera donc à celle effectuée initialement par l’employeur. L’employeur sera informé de la mise en œuvre des corrections, et du recouvrement des cotisations et contributions en découlant (y inclus les majorations et pénalités de retard) via une mise en demeure.
Si la correction est susceptible d’avoir des incidences sur les droits des salariés, ceux-ci seront également informés dans des conditions à déterminer par arrêté à paraître.
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc. Soc. art R. 133-14-3 nouveau
Opposition motivée aux corrections proposées
Dans le cas où le déclarant s’est opposé aux corrections proposées, une interlocution s’engage avec l’organisme de recouvrement qui peut réviser ses constats et ne pas procéder aux corrections initialement envisagées.
Si l’anomalie persiste, une phase contradictoire s’ouvre alors puisque la mise en recouvrement (via une mise en demeure) de tout ou partie des sommes en cause, y inclus majorations et pénalités de retard, ne pourra intervenir qu’après en avoir informé l’employeur et répondu à ses observations de façon motivée.
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc. Soc. art R. 133-14-4 nouveau
Conséquences de la DSN de substitution
Si l’employeur avait finalement versé davantage que les sommes dont il était redevable, l’Urssaf ou la MSA lui précise les modalités d’imputation ou de remboursement des sommes trop versées.
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc. Soc. art R. 133-14-4 et L. 133-14-5 nouveau
Cette nouvelle procédure de DSN de substitution ne préjuge pas des constations faites dans le cadre des contrôles initiés par les agents de contrôles des Urssaf ou MSA.
Décret n°2023-1384, art 1er, 6° ; C. Séc. Soc. art R. 133-14-6 nouveau
Le décret indique également que tout recours contentieux lié à la procédure de vérification et de correction reste soumis à un recours préalable obligatoire. En cas de redressement, la décision de la commission de recours amiable détaille, par motif de redressement, les montants qui sont annulés le cas échéant, et ceux dont le cotisant reste redevable (avec les délais et voies de recours).
Décret n°2023-1384, art 1er, 7° ; C. Séc. Soc. art R. 142-4 modifié
Info : Le cahier technique DSN 2024 porte un certain nombre de données concernant la DSN de substitution. A date, le GIPMDS indique que ces données ne concernent pas les éditeurs de paie, seulement les organismes de protection sociale.
Il y a dans le cahier technique 2024.1.2 la description de l’objet de la DSN de substitution (§5.6 du CT2024.1.2) : « Un nouveau modèle de message est créé à compter de la norme 2024 : la DSN de substitution.
Dans cette version de norme 2024, cette nature de DSN permet à l’Urssaf et à la Mutualité Sociale Agricole de reporter les justes droits des salariés lorsque des incohérences sont détectées lors des contrôles opérés par ces organismes.
La DSN de substitution est communiquée aux organismes gérant la retraite afin de leur permettre de prendre en compte ces droits dans la gestion des pensions des salariés.
Cette déclaration est ainsi à destination des caisses Urssaf et MSA, en charge du recouvrement des cotisations retraite du Régime Général et du Régime Agricole, et de la CNAV et de l'Agirc-Arrco.
L’Urssaf et la Mutualité Sociale Agricole sont les seuls émetteurs de cette DSN de substitution.
Dans un usage à venir cette DSN de substitution pourrait aussi être réalisée à la suite d’un des événements déclencheurs suivants :
- Actions de lutte contre le travail illégal (LCTI)
- Campagne de fiabilisation
La version de norme 2024 ne tient pas compte de ces cas d’usage, si ce n’est en les mentionnant dans le type de DSN de substitution, mais sans qu’aucune règle de fonctionnement et contenu ne soient statués à ce stade.
Ainsi, en 2024, la production de DSN de substitution fait uniquement suite à contrôle comptable d’assiette et contrôle partiel d’assiette sur pièces : les corrections sont effectuées dans le cadre de contrôles réalisés par les inspecteurs du recouvrement. »
L’arborescence du message DSN de substitution est également détaillée dans le cahier technique.
En pratique, comme la DSN de substitution est envoyée par les organismes Urssaf et/ou MSA uniquement à la suite d’un contrôle en 2024, il n’y aura pas d’automatisme mis en œuvre par ces organismes. Il y aura nécessairement eu un échange entre le déclarant et son organisme de recouvrement. L’éditeur de paie n’intervient pas dans la production de cette DSN de substitution.
Elodie Chailloux
Responsable Veille légale et DSN