Avril 2024
Le code du travail n’apporte pas de règles à suivre par les services Ressources Humaines en cas de changement d’identité. Un changement de prénom ou un changement de genre, dès lors qu’ils sont actés par des documents officiels d’identité, doivent être pris en compte sur l’ensemble des documents produits dans le cadre de la relation de travail. Une fois ce principe posé, son application peut soulever des questions, notamment pour le registre unique du personnel.
Les employeurs du secteur privé sont dans l’obligation de mettre en place un registre unique du personnel, dès l’embauche du premier salarié. Les indications relatives à l'embauche doivent être inscrites sur le registre de façon indélébile au moment de celle-ci. Ensuite, le registre doit être mis à jour régulièrement en fonction des évènements survenant postérieurement à l’embauche. Les informations devant être inscrites de manière chronologique, se pose la question de formaliser le changement d’identité sur ce registre. La DGT[1], que nous avons interrogée, apporte un éclairage sur la manière de procéder, l’occasion de faire le point sur le registre unique du personnel.
Registre unique du personnel : une obligation
Pour quels employeurs ?
Tenir un registre unique du personnel est une obligation qui s’impose à tous les employeurs du secteur privé dès l’embauche du premier salarié[2].
Il convient de mettre en place un registre unique du personnel au niveau de l’entreprise. En cas d’entreprise constituée de plusieurs établissements, un registre distinct doit être établi pour chaque établissement de l’entreprise[3].
A noter que les particuliers employant des gardiens ou du personnel de maison, ceux ayant recours au chèque emploi service universel (Cesu) ou encore les associations ayant recours au chèque emploi associatif sont dispensés de cette obligation.
Quels salariés concernés ?
Le registre unique du personnel concerne tous les salariés de l’entreprise quel que soit le contrat de travail ou le statut[4].
Les nom et prénoms des stagiaires et des personnes volontaires en service civique[5] accueillis dans l'établissement sont inscrits dans l'ordre d'arrivée, dans une partie spécifique du registre unique du personnel.
Quelles informations y sont mentionnées ?
Les noms et prénoms de tous les salariés sont inscrits dans l'ordre des embauches[6]. Ces mentions sont portées sur le registre au moment de l'embauche et de façon indélébile.
En plus des noms et prénoms, les informations complémentaires suivantes sont portées sur le registre[7] :
1° La nationalité ;
2° La date de naissance ;
3° Le sexe ;
4° L'emploi ;
5° La qualification ;
6° Les dates d'entrée et de sortie de l'établissement ;
7° Lorsqu'une autorisation d'embauche ou de licenciement est requise, la date de cette autorisation ou, à défaut, la date de la demande d'autorisation ;
8° Pour les travailleurs étrangers assujettis à la possession d'un titre autorisant l'exercice d'une activité salariée, le type et le numéro d'ordre du titre valant autorisation de travail ;
9° Pour les travailleurs titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, la mention « contrat à durée déterminée » ;
10° Pour les salariés temporaires, la mention « salarié temporaire » ainsi que le nom et l'adresse de l'entreprise de travail temporaire ;
11° Pour les travailleurs mis à disposition par un groupement d'employeurs, la mention « mis à disposition par un groupement d'employeurs » ainsi que la dénomination et l'adresse de ce dernier ;
12° Pour les salariés à temps partiel, la mention « salarié à temps partiel » ;
13° Pour les jeunes travailleurs titulaires d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation, la mention « apprenti » ou « contrat de professionnalisation ».
Selon l’article 11 de l’accord national interprofessionnel de 2005 sur le télétravail, les télétravailleurs sont identifiés comme tels sur le registre unique du personnel[8].
Concernant les travailleurs étrangers, une copie des titres autorisant l'exercice d'une activité salariée est annexée au registre unique du personnel et rendue accessible aux membres de la délégation du personnel du comité social et économique et aux fonctionnaires et agents chargés de veiller à l'application du code du travail et du code de la sécurité sociale. Elle est tenue à leur disposition soit dans l'établissement, soit sur chaque chantier ou lieu de travail distinct de l'établissement pour ceux des travailleurs étrangers qui y sont employés[9]. De la même façon, sont annexés et mis à disposition[10] les déclarations de détachement et leurs accusés de réception[11].
Dans la partie spécifique du registre unique du personnel consacrée aux stagiaires, les indications suivantes sont mentionnées [12]:
1° Les nom et prénoms du stagiaire ;
2° Les dates de début et de fin de la période de formation en milieu professionnel ou du stage ;
3° Les nom et prénoms du tuteur ainsi que le lieu de présence du stagiaire.
Quel support ?
Le code du Travail n’impose pas de formalisme. Le registre unique du personnel peut être réalisé sur papier ou sur un support informatique dans la mesure où il offre les mêmes garanties de contrôle[13].
Lorsque l'employeur recourt à un support de substitution[14] pour la tenue du registre unique du personnel, il doit[15] :
- Consulter[16] et recueillir l’avis des organisations représentatives d'employeurs et de salariés ;
- Informer l’inspection du travail[17]: l'employeur adresse à l'inspection du travail l'avis du comité social et économique[18] ;
- S’assurer que ce support est conçu et tenu de façon à obtenir, sans difficulté d'utilisation et de compréhension et sans risque d'altération, toutes les mentions obligatoires[19];
- Veiller à ce qu’il soit présenté dans les mêmes conditions et conservé pendant le même délai que le registre auquel il se substitue[20].
Quelles mises à jour ?
Le registre doit est mis à jour régulièrement.
Les mentions relatives à des événements postérieurs à l'embauche du salarié, ou à l'arrivée du stagiaire sont portées sur le registre unique du personnel au moment où ceux-ci surviennent[21].
La date à laquelle est intervenue la modification et reportée sur le registre permet de déterminer le point de départ de certains droits attachés à la nouvelle situation.
Par exemple, la mise à jour du registre s’impose lorsqu’un salarié, mis à disposition par une société d’intérim, est ensuite embauché en contrat à durée indéterminée par l’entreprise utilisatrice.
Quelle durée de conservation ?
Les mentions portées sur le registre unique du personnel sont conservées pendant cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié ou le stagiaire a quitté l'établissement[22].
Qui a accès au registre unique du personnel ?
Le registre unique du personnel est tenu à la disposition du comité social et économique et des agents de l’inspection du travail chargés de veiller à l'application du code du Travail et du code de la sécurité sociale[23].
Quelle sanction ?
Le non-respect des obligations liées au registre unique du personnel est passible de sanctions pénales (peine d'amende de 4ème classe appliquée autant de fois qu'il y a de salariés concernés)[24].
Comment procéder en cas de changement d’identité ?
Lorsque le salarié change officiellement d’identité (avec de nouveaux papiers d’identité), l’employeur doit opérer les modifications sur l’ensemble des documents officiels et non officiels.
Concernant le registre unique du personnel, se posait la question sur la façon de faire apparaître les changements de nom, prénom ou sexe en cas de changement officiel d’identité.
Comme évoqué ci-dessus, le code du Travail indique que les mentions relatives à des événements postérieurs à l’embauche du salarié, ou à l’arrivée du stagiaire sont portées sur le registre du personnel au moment où ceux-ci surviennent. Toutefois, mise à part la date du changement qui est impérative, les textes ne précisent pas le formalisme lié au changement.
Selon la DGT, il convient de procéder à la modification sur la même ligne et ajoute qu’il semble préférable de conserver les précédentes informations pour faciliter le suivi.
Prenons un exemple :
Mr X est embauché le 15 avril 2023 : une ligne est ajoutée dans le registre unique du personnel pour faire mention de cette embauche avec l’ensemble des informations obligatoires.
Ensuite, Mr X, devient Mme X au 1er février 2024 : la ligne de l’embauche comporte une modification du prénom et du sexe avec une date de changement.
La DGT ne recommande pas la création d’une nouvelle ligne pour éviter les confusions avec une nouvelle embauche qui n’existe pas.
Enfin, concernant l’utilisation du prénom d’usage dans le registre unique du personnel, l’article L.1221-13 du code du Travail prévoit que les noms et prénoms des salariés font partie des éléments obligatoires à inscrire dans le registre unique du personnel. Par conséquent, il est préférable de ne pas inscrire le prénom d’usage dans ce document officiel.
Muriel Besnard
Consultant Juridique
[1] Direction Générale du Travail
[2] Article L. 1221-13 du code du Travail
[3] Cass. crim., 31 janv. 2012, n° 11-85.226, n° 757 F - P + B.
[4] Article L. 1221-13 du code du Travail
[5] Au sens de l’article L. 120-1 du code du service national
[6] Article L. 1221-13 du code du Travail
[7] Article D. 1221-23 du code du Travail
[8] L’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 (étendu par arrêté du 30 mai 2006, JO du 9 juin 2006) s’impose aux employeurs et salariés compris dans son champ d’application professionnel et territorial (à l’exception des articles 2 et 3 remplacés par l’ANI du 26 novembre 2020) et donc aux employeurs relevant d’un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires : Medef, CGPME (actuellement CPME) et UPA (actuellement U2P). Pour ces employeurs, cet ANI s’impose, sauf si un accord collectif d’entreprise sur le télétravail en écarte son application.
[9] Article D. 1221-24 du code du Travail
[10] Articles D. 1221-24-1 et L. 1221-15-1 du code du Travail
[11] Les accusés de réception des déclarations de détachement mentionnées aux articles R. 1263-3, R. 1263-4 et R. 1263-6 du code du Travail
[12] Article D. 1221-23-1 du code du Travail
[13] Articles L. 1221-14 et L. 8113-6 du code du Travail
[14] Article D. 1221-27 du code du Travail
[15] Article D. 8113-2 du code du Travail
[16] Consultation du comité social et économique prévue à l’article L. 2315.5 du code du Travail.
[17] Article D. 8113-3 du code du Travail
[18] Article D. 1221-27 du code du Travail
[19] Article D. 8113-2 du code du Travail
[20] Article D. 8113-2 du code du travail
[21] Article D. 1221-25 du code du Travail
[22] Article R. 1221-26 du code du travail
[23] Article L. 1221-15 du code du Travail
[24] Article R. 1227-7 du code du Travail