ADP Research Institute a fait paraitre au mois de mai dernier la 8ème édition de son enquête annuelle sur la perception des salariés : « People at Work 2024 ». Elle a été réalisée auprès de 34 612 salariés dans le monde, de tous secteurs et tailles d’entreprises, dont 15 383 en Europe ; près de 2000 en France.

Son intérêt réside notamment dans la comparaison avec les années antérieures successives. Une telle comparaison permet de dégager les tendances et les évolutions utiles à tous les professionnels de la fonction RH, en s’appuyant sur des données descriptives – bien que déclaratives – sur ce que sera demain le monde du travail. Et de fait, la toute dernière édition 2024 fait apparaitre des lignes de force très intéressantes.

Ces lignes de forces sont multiples, et notre intention n’est pas de les aborder dans le détail aujourd’hui. Il y faudra plusieurs articles d’analyse, que vous retrouverez sur RH info au fil de leur parution.

Les ajustements post-pandémiques sont derrière nous et une nouvelle ère est en train de naître pour le monde du travail, sous l'effet de tendances anciennes et de mutations rapides, que la société et les entreprises doivent encore apprendre à maîtriser.

Des fondamentaux : salaire et sécurité de l’emploi, oui mais…

Au fil des années, le salaire reste la priorité n°1 des actifs (pour 55% des répondants en moyenne) Comment s’en étonner, sachant que le taux de chômage des plus grandes économies mondiales est désormais inférieur aux niveaux d'avant la pandémie, et que l’inflation reste importante ? Sans compter que les salariés attendent clairement cette année des augmentations de salaire significatives. En Europe, seuls 53 % des travailleurs estiment être rémunérés à leur juste valeur, contre 67 % au niveau mondial ; et en France, ce chiffre baisse à 46 % !

La sécurité de l’emploi arrive en général en deuxième position (46%), sauf en Europe où l’épanouissement au travail (43% contre 29% dans le monde) prend une importance accrue après les bouleversements de ces dernières années.

Le travail hybride et à distance, autrefois exceptionnel, est devenu monnaie courante. La flexibilité sur le lieu et les horaires de travail semble constituer désormais plutôt un acquis qu’une attente. Car contrairement à ce qui se dit ici ou là dans les médias, les exigences de retour au bureau semblent être davantage des déclarations d'intention que des mesures concrètes. Les travailleurs affirment que leur employeur se montre plus flexible en termes d'horaires et de lieu de travail, même s’il reste vrai qu’ils sont encouragés à passer plus de temps sur site : dans les faits, en Europe seuls 11% se montrent vraiment plus exigeants pour ramener les télétravailleurs sur site ; 23 % se montrent au contraire plus flexibles et 66% n’ont rien changé aux modes de travail acquis, au dire des répondants à l’enquête.

Cela étant, les télétravailleurs, ou ceux qui travaillent en mode hybride se sentent plus surveillés que les autres, et moins en sécurité. Les managers sont même plus enclins que les collaborateurs à croire qu'ils sont surveillés : plus de 77 % des cadres supérieurs déclarent que leur employeur les surveille plus étroitement, contre 46 % des collaborateurs. Voilà qui ne laisse pas d’étonner !

Une forte expectative face à l’Intelligence Artificielle

Les progrès technologiques – et notamment le développement de l’intelligence artificielle générative – sont perçus à la fois comme un risque et une opportunité : 42 % des travailleurs dans le monde pensent que l'IA remplacera tout ou partie de leurs fonctions dans les trois ans qui viennent. Son émergence a modifié la perception des uns et des autres en ce qui concerne la sécurité de leur emploi, selon qu’ils voient d’abord la facilitation engendrée ou l’incertitude de son impact.

Un paradoxe : près de 18 % des travailleurs européens affirment que l'IA n'aura pas d'impact sur leur travail dans les deux ou trois prochaines années, contre 8 % de moyenne mondiale. Inconscience ou optimisme ? Peut-être aussi Les promesses de l'IA restent-elles éloignées de leur réalité quotidienne et professionnelle ? Il est vrai que les entreprises européennes ont moins tendance à communiquer sur ce sujet. Ces nouvelles technologies ont pourtant le potentiel de modifier le travail à un niveau fondamental.

Des valeurs sociales et environnementales importantes

Les débats nationaux sur les initiatives environnementales, sociales et de gouvernance et sur la diversité, l'équité et l'inclusion varient considérablement dans le monde et sont fortement influencés par les normes et les pratiques culturelles, réglementaires et politiques.

Néanmoins les travailleurs soucieux de minimiser les changements climatiques et les émissions de carbone sont les plus satisfaits de la participation de leur employeur en matière d'ESG dans ces domaines (80 %). Les mesures prises par les employeurs en termes de confidentialité des données (79 %) et de promotion d'un lieu de travail sûr et inclusif (78 %) sont également bien classées. L'éradication de la corruption obtient le score le plus bas sur l'échelle de satisfaction, mais reste toutefois bien placée avec 67 %.

Le niveau de stress et la santé mentale toujours en question

L'année dernière, l’enquête avait mis en évidence les conséquences du stress que ressentait les salariés sur le lieu de travail. Cette année encore, la moitié des travailleurs déclarent ressentir du stress au travail, mais la proportion de ceux qui indiquent en ressentir quotidiennement est tombée en dessous des niveaux d'avant la pandémie. La proportion est passée de 19 % en 2021 à 16 % en 2022, puis à 15 % en 2023.

Il reste que seules 21 % des personnes interrogées estiment que leur employeur soutient pleinement leur bien-être mental. Et en France, 43 % d'entre elles déclarent que leur travail pâtit d'une mauvaise santé mentale ; c'est la proportion la plus importante en Europe.

Conclusion : investir dans la transformation

Près de la moitié des travailleurs interrogés dans le monde s'accordent à dire que les compétences de demain incluront une maîtrise technologique qui n'est pas considérée comme indispensable pour leur poste actuel.

Les travailleurs ne sont pas satisfaits de leur employeur en ce qui concerne le développement des compétences et la formation. Les compétences – ou le manque de compétences – d'un travailleur influent sur son sentiment à l'égard de l'essor de l'intelligence artificielle. Si la plupart (60 %) reconnaissent avoir les compétences nécessaires pour évoluer dans leur carrière au cours des trois prochaines années, moins de la moitié (47 %) estiment que leur employeur investit dans les compétences dont ils ont besoin pour progresser. Ils sont 53 % à ne pas être convaincus de l'investissement de leur employeur dans le développement de leurs compétences.

Là encore, les entreprises européennes sont les moins enclines à aborder la question du développement des compétences ou de la progression de carrière avec leurs salariés : seuls 46 % d’entre eux discutent avec leur employeur de leur progression de carrière, soit 20 % de moins que les travailleurs du monde entier. Ce n’est pas anecdotique !

Dans le contexte actuel d'évolution rapide, les entreprises doivent développer leur capital humain. Les changements démographiques et les technologies émergentes de l'IA montrent clairement que le monde du travail est en pleine mutation. Ces bouleversements annoncent un monde du travail marqué par des changements continus et rapides dans un avenir relativement proche.

Afin de s'adapter au rythme des évolutions, les employeurs ne peuvent pas se contenter de recruter des talents pour pourvoir les postes actuels. Ils doivent également développer ces talents et accroître les compétences pour les futurs postes. En favorisant un environnement d'apprentissage continu, les entreprises peuvent fournir des ressources aux travailleurs pour qu'ils développent leur expertise professionnelle et acquièrent de nouvelles compétences. Investir dans la formation et le développement aidera les employeurs à atteindre des niveaux de productivité plus élevés. Le changement n'est pas un simple défi. Il constitue une opportunité de croissance.

People at Work 2024

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Tags: People at Work Perception des salariés Stratégie RH

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