Présentation de l’ouvrage paru sous ce titre aux Editions Territorial en juillet 2024

Le désengagement des agents et des salariés a provoqué une rupture organisationnelle. Le phénomène est devenu intergénérationnel. Quelles en sont les causes et les raisons ? Les entreprises peuvent-elles s’adapter aux nouvelles demandes des salariés ?

Pourquoi avoir actualisé la première partie du livre parue en 2016 ?

La première partie du livre écrite en 2016 analysait les mécanismes qui engendraient les comportements difficiles dans les entités et proposait d’améliorer l’interrelation avec les managers pour y remédier. Aujourd’hui, le rapport au travail a changé dans sa relation à l'entreprise ; et il se caractérise par un détachement des salariés vis-à-vis de leur activité professionnelle, pouvant conduire à une rupture brutale. Le collaborateur a pris conscience des incohérences entre les discours des dirigeants et leurs actes. Il a constaté la distance entre les perspectives qui lui sont offertes et les potentialités réelles d’atteindre un épanouissement personnel. Il a réalisé l’inutilité sociale de son rôle au sein de l’entreprise. A la recherche de plus d’efficience, l’organisation du travail a coupé le lien qui existait entre sa contribution individuelle et la réalisation finale du service ou du produit. Les contraintes de performances ont rendu le salarié substituable. Il le sait et ne l’accepte pas.

Comment le désengagement des salariés a-t-il pu s’installer ?

Des nombreuses enquêtes relatent la demande des individus pour le plaisir au travail. La période Covid et son corollaire le télétravail ont bouleversé les conditions de l’activité. Tout en ressentant le manque de relation avec les collègues, un climat familial qui satisfait les besoins fondamentaux, a permis à la personne de développer son autonomie en parallèle des protocoles instaurés et obligatoires. Le télétravail est désormais considéré comme un avantage qu'elle ne veut pas perdre.

 Par ailleurs, l’individu a été embauché sur ses compétences et félicité pour ses résultats, quand il souhaite que son identité personnelle au travail soit reconnue avant ses performances. Il a pris conscience de sa faculté d’apprendre de la situation de travail. Désormais, il est en capacité de proposer d’autres pratiques que celles qui lui sont imposées. Le refus par l’entreprise de les considérer générera chez lui une grande frustration, qui ne sera pas prise en compte car on ignore le conflit intérieur qui oppose son comportement contraint à son système de fonctionnement interne. Cette opposition entre l’intelligence au travail et les obligations de la structure ne sera pas traitée. Souvent le manager n'en a pas conscience et même s’il le perçoit, il ne saura pas comment l’aborder. S’il n’est pas soumis lui-même à une charge de travail de plus en plus importante sans qu’il ait le moyen d’y trouver une alternative. On connaissait le burn out ou atteinte de la santé mentale par un engagement au travail trop important. On connaît aujourd’hui la détresse psychologique de ceux qui ne trouvent plus dans leur travail les conditions de leur accomplissement sans avoir les moyens d’atteindre leur réalisation personnelle.

Quelles sont les conséquences de cette situation ?

Le mot est lancé, celui de situation. Ainsi, la dégradation de la relation entre manager et managés est susceptible de créer une situation de travail insatisfaisante en mesure de nuire à la performance du salarié. Un mot de trop prononcé ou un non-dit sous la forme d’une rumeur qui s'amplifie, ne peut que créer un mal-être chez l’individu. La détérioration des relations professionnelles sera à même de développer chez lui un sentiment d’impuissance et parfois de culpabilité. Il n’aura pas le moyen de régler seul sa difficulté car la cause de son mal-être est externe. Dans certains cas, la détérioration de sa santé mentale le mettra devant un choix difficile à opérer. Soit ne rien dire et somatiser dans une détresse psychologique qui ne sera susceptible que s'accroître. Soit, oser parler à son supérieur pour lui annoncer sa démission car il « n’en peut plus ».

La situation de difficulté que vit la personne sera susceptible d’impacter son entourage et de se répercuter sur le comportement de ses collègues et de son manager. Ceux-ci la perçoivent peu ou prou ; certains compatissent et beaucoup préféreront le « pas de vague ». Le contrat de travail, rémunération contre obéissance a créé au détriment du salarié un état d'infantilisation où il aura tendance à ne pas prendre plus de responsabilités que sa feuille de poste n’en prévoit. La peur d’une sanction indéfinie bloquera son expression.

Peut-on pallier le désengagement des salariés ?

La personne en difficulté n’est pas la seule responsable de son état de mal-être. Elle est en interrelation avec une hiérarchie, des collègues dont la responsabilité est peu ou prou engagée par une organisation du travail collective. Elle est également impactée par leur comportement dans une situation de travail vécue ensemble. La responsabilité du désengagement a pour socle la responsabilité collective. Les causes externes de la détérioration de la santé mentale du collaborateur ne sont pas de son fait si les raisons internes lui appartiennent. La main tendue par son supérieur hiérarchique serait susceptible de l’aider à les identifier.

Pour l’encadrant, analyser un processus de désengagement, pourrait débuter par une veille comportementale des transformations dans l’attitude du salarié. La démarche est simple et ressort d’une volonté de soutien. Les textes du dialogue social réglementent les rencontres obligées entre la hiérarchie et le personnel. Ils ne prévoient pas les modalités d’un dialogue professionnel qui pourrait s’instaurer dès que nécessaire entre manager et salarié. Personne n’y est obligé sauf pour l’encadrant à résoudre l’impérieuse nécessité d’aider un membre de son équipe en difficulté afin de maintenir l’équilibre d’ensemble.

 L’ouvrage suggère des modes de communication qui ont fait leur preuve pour susciter la rencontre et être capable d’échanger sans jugement ni évaluation. Il propose plusieurs témoignages vécus de salariés désengagés, la façon dont la relation s’est établie entre le manager et son collaborateur et les solutions qui ont pu être trouvées : l’entreprise n’est pas toujours en capacité de s'accommoder à la demande de son salarié.

Citons pour exemple celui de la jeune diplômée qui souhaite démissionner d’un emploi bien rémunéré car elle ne trouve pas de joie dans son travail. Celui d’un senior, cadre supérieur qui, à deux ans de la retraite rentre en conscience qu’il a passé sa vie à récolter récompenses et honneurs au détriment de sa vie de famille, et qui prend l’initiative de rencontrer le Président de sa collectivité pour lui annoncer son départ. Le cas d’un infirmier dans un hôpital, submergé par les tâches administratives et qui n’accomplit pas son métier comme il le souhaiterait, et qui ose demander un entretien à son responsable hiérarchique pour lui annoncer sa démission. Celui d’une jeune avocate qui plaide contre ses convictions profondes et veut quitter son employeur ; ou encore le retour difficile d’un télétravailleur dans son administration, rentré en antagonisme avec ses collègues et qui n’accepte pas de vivre son travail dans une situation de conflit quasi permanente.

L’ouvrage proposera des clés afin d’aider le RRH, le manager ou le directeur à identifier la « propension fondamentale » ou tendance intime et essentielle du collaborateur ; qui, si elle n’est pas prise en compte, provoquera chez la personne et de façon irrémédiable, l’apparition d’un mal-être progressif. L’erreur de casting à l’embauche de quelqu’un qui ne satisfera pas ses besoins fondamentaux au travail, surgira à plus ou moins longue échéance. Souvent l’individu n’est pas en conscience de sa propension fondamentale et il choisira un emploi suivant les opportunités du moment. L’ouvrage soumettra au lecteur un mode de communication spécifique afin d’identifier chez une lycéenne l’orientation la plus adaptée à qui elle est.

En fait, ce que vous préconisez n’impliquerait-il pas de réfléchir du modèle de fonctionnement des entités ?

Telle est la conclusion probable d’un ouvrage qui tentera d’identifier comment établir une dimension commune avec des personnes en conscience de leurs besoins. L’entreprise n’a plus à gérer des compétences mais des mondes complexes et différents, des identités au travail. Le désengagement des salariés s’apparente à un processus d’apprentissage en situation de travail qui prend en compte des paramètres oubliés, le temps et l’espace. Le temps que l’on a aplati et raccourci pour concentrer dans l’instant de multiples tâches, et l’espace de travail qui ne laisse plus que peu de place pour un espace pour soi. La reconnaissance de l’individu est conditionnée par celle de sa tâche, si modeste soit-elle à la réalisation du but de la structure, service d’intérêt général pour les collectivités locales et service sociétal pour les entreprises.

Il reviendrait aux entités de démontrer qu’il est possible de créer une alliance avec chacun des membres de leur personnel. A une condition, celle que les moyens collectifs auxquels elles recourent, telle la Qualité de Vie au Travail ou la Responsabilité Sociétale des Entreprises/Organisations, ne peut faire l’impasse sur la stratégie de la main tendue du manager au collaborateur en difficulté. La réussite collective dépend de l’épanouissement de chacun. S’il y a une volonté, il y aura un chemin. Celui non utopique de la réalisation de soi au travail !

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Tags: Désengagement Comportements Travail