« De plus en plus de personnes invoquent leur neurodiversité pour en faire le moins possible ! Ils se disent hypersensibles, ne supportent pas le bruit ni la lumière, ni simplement la nouveauté quand elle se présente. Ils sont constamment angoissés et ont besoin de pauses. Ils peuvent bien raconter ce qu’ils veulent, personne ne peut vérifier ! »

Cependant, un professionnel en RH s’exprimera autrement :
- « Oui, la neurodiversité est une réalité, souvent avec une RQTH à l’appui. Nous avons régulièrement des cas d’autisme et de dyslexie à gérer. »
- « Intégrer la neurodiversité au sens large dans les missions de nos services Diversité et Inclusion n’est pas à l’ordre du jour. Il y a d’autres sujets plus courants à traiter en priorité. »

Dans le premier cas, il s’agit d’un déni assez habituel en France.
Cependant, de nombreuses preuves scientifiques démontrent désormais qu’il s’agit d’une réalité bien documentée : les cerveaux des personnes neurodivergentes ne sont pas câblés comme la plupart des cerveaux « neurotypiques ».

Dans le deuxième cas, c’est une erreur de considérer que la neurodiversité est moins courante que les différences visibles « classiques ». En fait, elle se retrouve partout dans l’entreprise.

Mais la neurodiversité ne se voit pas !

Les spécificités d’une personne ayant un Haut Potentiel Intellectuel, et/ou un Trouble du Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité, et/ou des Troubles Dys, et/ou un Trouble du Spectre Autistique ne sont évidents ni pour un observateur extérieur, ni, bien souvent pour la personne elle-même qui peut passer toute sa vie sans savoir qu’elle est concernée. Par exemple, j’ai eu mon diagnostic de TSA à l’âge de 57 ans. Et je suis également HPI et TDAH.

Coach internationale expérimentée, j’ai le privilège d’être souvent choisie par des personnes neurodivergentes dans le cadre de leur accompagnement.
Je peux ainsi vous proposer quelques cas réels basés sur des entretiens tripartites ou quadripartites, des debriefings de 360° et de profils comportementaux, et bien sûr d’entretiens et de questionnements ayant eu lieu lors des séances de coaching.

Ce ne sont pas les cas les plus courants, mais je les trouve intéressants pour illustrer mes propos.

Il a toujours raison…

Pascal est responsable logistique.

Il va très vite, saute aux conclusions et ne sait pas prendre le temps d’expliciter ce qu’il a en tête. Ses idées fusent constamment et il peut envoyer des mails à n’importe quelle heure.

Il peut apparaître hautain et méprisant, toujours très impatient. Il s’occupe aussi bien de stratégie que de production et ne favorise pas l’évolution de ses collaborateurs.
Ceux-ci ne se sentent ni pris en compte, ni respectés, et se démotivent rapidement.
La vie de l’équipe est impactée par ce fonctionnement et la qualité de vie au travail de chacun est dégradée : burn-out, absences répétées, départs volontaires.

Quand la situation persiste, il arrive qu’une enquête pour harcèlement soit ouverte contre ce manager.

Faire plaisir à tout prix…

Danielle est assistante des ventes.

Très dynamique, efficace et rapide lors de sa prise de poste, elle ne sait pas et ne veut pas dire non. C’est contre ses valeurs profondes.

Un an plus tard, elle ne dit toujours pas non et elle est totalement dépassée : elle est désorganisée et a perdu le sens des priorités.
Elle ne supporte pas les feed-backs, et se justifie constamment de manière maladroite et peu précise.

Elle n’a plus confiance en elle et se montre très angoissée.
Ses lacunes sont de plus en plus visibles : elle ne comprend pas toujours ce qu’on lui explique et il faut recommencer plusieurs fois, à intervalles réguliers.

Au début, tout le monde l’aidait volontiers, mais avec le temps, elle est devenue décourageante, d’autant plus qu’il est impossible de compter sur elle.

Travailler pour nourrir son cerveau…

Élodie est data-analyste.
En deux ou trois ans, elle a en général « fait le tour » et commence à s’ennuyer alors qu’on lui a confié bien plus de missions que celles initialement prévues dans son profil de poste.

Tout l’intéresse, elle aime apprendre et se développer. Elle n’a pas spécialement l’ambition d’évoluer hiérarchiquement. Sa principale raison d’être en entreprise est de faire avancer les choses et surtout d’apprendre sans cesse, de « nourrir son cerveau ».

Les postes où elle a eu le plus de mal ont été les postes où la politique et les petits arrangements entre amis allaient à l’encontre du sens logique des décisions professionnelles qu’elle devait prendre.

Même si elle est reconnue pour son travail et que son poste et son salaire évoluent, l’ennui et le manque de sens peuvent la faire partir très vite vers de nouvelles aventures.

Et quoi encore ?

Vous reconnaissez ces situations ?

Pour vous faire une idée encore plus précise, voici une liste très complète (mais non exhaustive !) des objectifs régulièrement travaillés en coaching par des personnes neurodivergentes. En filigrane, vous verrez apparaître des situations classiques liées à la neurodiversité :

  • Adapter ma communication en toutes circonstances.
  • Développer l’écoute et l’empathie.
  • Être plus clair dans mes prises de parole
  • Améliorer ma gestion du temps et des priorités
  • Gérer ma tendance à la procrastination
  • Améliorer ma confiance en moi
  • Mieux gérer mes émotions
  • Proposer et demander des feed-backs
  • Adapter mon niveau d’exigence envers les autres et moi-même
  • Accepter de prendre en compte les idées des autres
  • Communiquer sur mes avancées
  • Savoir parler de mes réussites

Si certains de ces objectifs sont complémentaires, d’autres apparaissent plutôt comme contradictoires. Et cependant, tous évoquent la neurodiversité.
Qui est elle-même très diverse…

Pas d’hésitation, sensibilisation !

Quand une entreprise décide d’inclure la neurodiversité dans son programme Diversité et Inclusion, la sensibilisation de toutes les strates de l’entreprise est indispensable : de la Direction au dernier stagiaire arrivé, chacun peut être concerné.

Ce n’est pas une question de diplômes ni de place dans l’organigramme mais de connexions neuronales propres à chaque être humain.

« Mais sensibiliser, ce sera obligatoirement stigmatiser ! »

Pas nécessairement.

Le but d’une telle sensibilisation doit être de provoquer une prise de conscience collective sur le fait que la neurodiversité est omniprésente dans tout contexte professionnel. En effet, si chacun a sa manière de réfléchir, de prendre ses décisions et d’interagir avec les autres, il est possible que certains dans le groupe ou l’équipe soient encore plus différents que les autres, sans aucune mauvaise volonté et, très souvent, sans même s’en rendre compte.

Habituellement, dans un contexte professionnel spécifique, il est important de parler la même langue que son interlocuteur. Quand ce n’est pas le cas et que les malentendus persistent, il arrive que des points de tension se cristallisent jusqu’à l’exaspération réciproque ou même jusqu’au conflit entre les deux personnes.

Quand cela arrive, la clé peut être à rechercher du côté de la neurodiversité de l’un OU de l’autre, sans plus de précisions.
Dans l’idéal, la sensibilisation collective permettra aux deux protagonistes de discuter de manière objective et constructive pour poser ensemble les bases d’un nouveau cadre de travail en prenant en compte les besoins de chacun.

Cela ne fonctionnera pas toujours parce que les personnes concernées seront peut-être déjà à un point de non-retour. Un médiateur pourra être alors nécessaire (un RH sensibilisé à la neurodiversité).

Quoi qu’il en soit, la sensibilisation pourra aider les RH, les managers et les collègues dans toutes les étapes du cycle professionnel. 

En conclusion, plus les personnes seront sensibilisées, plus il sera facile d’avancer tous ensemble vers une meilleure qualité de vie au travail et une plus grande sécurité psychologique. Il sera plus facile de réenchanter le quotidien professionnel de tous.

Tags: Neurodiversité Diversité Inclusion