Jamais le potentiel de création de valeur par la fonction RH n’a été aussi important. Pour une raison simple : en l’espace d’une génération, le travail s’est profondément transformé. Son contenu bien sûr, mais aussi sa nature. De ce fait, l’action sur les variables que sont l’engagement des collaborateurs et leurs compétences a beaucoup plus que par le passé un impact direct sur le développement économique de l’entreprise.
Sans action structurée, cet impact restera théorique. L’activité de la DRH, mais aussi son organisation, doivent permettre de matérialiser ce potentiel.
L’enjeu organisationnel
La DRH doit en effet transformer non seulement ses terrains d’intervention (donc son centre de gravité, ses compétences et sa légitimité), mais aussi son modèle organisationnel et la répartition des rôles entre elle-même et les managers.
Quand nous parlons ici d’organisation, nous utilisons la notion au sens large. Elle recouvre bien sûr la structure RH et son niveau plus ou moins poussé de centralisation, mais aussi les processus mis en œuvre, les responsabilités respectives des différents acteurs, leurs articulations et les modes de fonctionnement effectifs.
Faut-il rappeler qu’il n’existe pas de modèle organisationnel idéal dans l’absolu ? L’organisation doit être contingente. Autrement dit, elle doit être définie au regard des enjeux que l’entreprise a à traiter.
Centraliser pour structurer
Dans certaines entreprises, l’enjeu RH premier reste de garantir les basiques ou de les restaurer. Une paie non fiabilisée, des pratiques de management défaillantes, des caractéristiques de la culture à faire muter, des conditions de travail problématiques, un turn-over ou un absentéisme hors normes, etc. Il va s’agir pour la DRH de prendre à bras-le-corps cette situation et de la régler.
Il ne fait aucun doute que la fonction RH doit alors être centralisée. Que l’ensemble des équipes RH des différentes entités soient rattachées hiérarchiquement à la DRH Groupe ou que celle-ci constitue un centre à qui toute l’autorité nécessaire a été conférée.
Pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise, La DRH va édicter un certain nombre de règles et les faire respecter. Dans un tel contexte, elle a en premier lieu une responsabilité de production, consistant à délivrer de manière prescriptive des prestations matérielles ou immatérielles pour les acteurs internes dans une logique répétitive, de nature plus ou moins industrielle.
Tant que ce qui pose problème n’a pas été traité, cette organisation doit subsister. Certaines entreprises en sont restées à ce stade, faute d’être parvenues à stabiliser ou à normaliser leurs fonctionnements. Dans la plupart des organisations, fort heureusement, cette logique a pu être dépassée.
Renforcer l’expertise depuis le centre
La structure RH centrale a dans ce cas pour mission principale d’élaborer les politiques RH et de structurer les processus correspondants. Elle joue pleinement son rôle qui consiste à imaginer et à définir des politiques, des principes communs, des guidelines pour l’ensemble du Groupe. Elle a également une activité d’animation en pilotant l’implémentation de ces politiques RH et donc en garantissant leur caractère effectif au sein des différentes entités.
Pour que ce déploiement soit possible, elle va devoir faire monter en compétence les équipes RH des différentes entités : développer leurs compétences métiers, alignées sur les politiques définies, mais aussi leur capacité à adopter avec les opérationnels le bon positionnement et les bonnes postures. Puisqu’il s’agira pour elles d’accompagner les managers dans la mise en œuvre effective des politiques définies. Dans le même temps, initier et mener des projets répondant aux besoins immédiats de ces opérationnels permettra d’assurer la crédibilisation.
Dans cette deuxième phase, l’organisation RH reste centralisée de manière à assurer l’ancrage des politiques définies et l’alignement des acteurs. Peuvent alors être mis en place des Centres de Services Partagés, internes ou externalisés, en charge d’exécuter les activités à caractère répétitif, ce qui permettra à la DRH de déplacer son centre de gravité.
Créer de la valeur après avoir décentralisé
Trop d’entreprises s’en tiennent là. Alors que la DRH peut aller beaucoup plus loin dans ce qu’elle apporte à l’entreprise si elle est capable d’engager un mouvement de décentralisation de son organisation, de manière à pouvoir se concentrer au niveau Groupe sur ce qui créera le plus de valeur.
Dans cette optique, le centre va pouvoir transférer aux RH des entités opérationnelles l’ensemble de ses activités de production. Il pourra même aller plus loin une fois la nouvelle organisation stabilisée, en réduisant son rôle de pilotage. Ce mouvement n’est possible que parce qu’il peut s’appuyer sur la montée en compétences préalable des équipes RH.
Autre mouvement, réalisé au niveau des entités opérationnelles : le transfert de responsabilités de gestion des collaborateurs des RH vers les managers. Est-il nécessaire de rappeler que l’entreprise capitalisera d’autant plus sur son potentiel humain que les managers auront intégré les politiques RH, compris leur valeur ajoutée et aligné leurs pratiques sur ce qui est attendu ? Cela suppose que la fonction RH s’attache à travailler avec les managers la qualité de leurs pratiques dans les différents domaines RH, qu’il s’agisse de management de la performance, de développement des compétences des collaborateurs, de gestion de leur parcours, de rémunération, etc. Elle y parviendra en adoptant systématiquement avec eux une posture de coach sur cette qualité des pratiques.
Libérée des activités de production, pouvant aller jusqu’à décentraliser les pôles d’expertise, la DRH Groupe pourra se focaliser sur les transformations profondes que requiert l’environnement de l’entreprise, qu’elles soient de nature culturelle ou organisationnelle. Elle structurera ses activités autour de projets majeurs. Elle apportera alors toute sa valeur potentielle.
Comment procéder pour mener cette transformation ? Prenons un exemple récent de projet de ce type. Aésio étant le fruit du rapprochement de plusieurs mutuelles, le Groupe souhaitait constituer une DRH pour l’ensemble. Celle-ci devait porter des politiques RH communes dans le cadre d’une organisation RH performante. L’enjeu principal était de proposer aux différents Métiers plus de proximité et davantage d’accompagnement des transformations.
Le projet a été conduit en mobilisant le CODIR RH sous forme d’équipe projet. Une analyse fonctionnelle des activités RH a été produite, une enquête clients a facilité la formulation des axes prioritaires, partagés et priorisés par le Codir. Une analyse des principaux processus a également permis d’identifier les domaines où des progrès étaient requis.
Résultat qui peut être observé par tous aujourd’hui : la DRH répond mieux aux enjeux. Elle intègre désormais une entité en charge de l’accompagnement des transformations, un service dédié au management de la performance, une cellule de la professionnalisation de la fonction RH et une logique de « Partenaires RH » au sein des Métiers, jusqu’ici incomplète.
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