J’étais là, en plein confinement (celui de mars-avril 2020, je précise pour nos lecteurs du futur), à vérifier - comme tout le monde - mes réserves de pâtes, de riz, de papiers toilette, tout en conseillant par skype une amie en recherche d’emploi. Je vais être honnête avec vous : j’aime et je n’aime pas faire ça. J’aime, parce qu’aider ses amis et les conseiller sur un domaine que l’on connait très bien (j’ai été recruteur), forcément ça fait plaisir, surtout la satisfaction quand l’ami(e) en question trouve le job de ses rêves. Mais en même temps je n’aime pas parce que, 8 fois sur 10, je termine énervée…
Enervée par ce que l’on m’a raconté sur la façon dont, en 2020 (toujours pour nos lecteurs du futur, dont je salue au passage Coronavi - dans le futur que j’imagine, le top des prénoms les plus répandus en France peut surprendre (edit après la rédaction de l'article : le futur est déjà là) on continue de traiter les candidats sans beaucoup de considération. Et vas-y que je te fixe un RDV téléphonique auquel je ne me présente pas pour cause de réunion prolongée, et tiens que je ne réponds pas à ton MP sur Linkedin alors même que mon poste est "responsable expérience candidat" d’un grand groupe, et voilà que je ne te réponds plus alors que tu as posé deux demi-RTT pour venir à deux entretiens en pleine journée, et bien entendu le best seller dans tes dents "malgré tout l’intérêt de votre candidature, nous ne donnerons pas suite à celle-ci, cordialement". Et après, on s’étonne que les candidats se mettent eux aussi au ghosting (rien à voir avec Demi Moore, voir ce que c’est ici).
Et tout de suite je désamorce : non tous les recruteurs ne sont pas pareil, oui beaucoup font bien leur job, et oui beaucoup savent faire preuve d’empathie envers les candidats. Mon sujet ici, il est plutôt d’essayer de convaincre les autres de l’intérêt de le faire aussi.
La base, ça mange pas de pâtes de le rappeler
Bien entendu, le vrai et seul intérêt pour une entreprise de s’assurer que les candidats qui postulent à ses offres sont bien traités, se résume en fait très simplement : l’éducation, le respect, la considération pour l’autre.
L’article pourrait prendre fin ici, mais comme je pense que la façon dont on traite les candidats est en fait souvent un symptôme de la façon dont on considère la Personne dans l’entreprise, je vais prendre un peu de hauteur.
L’Expérience Candidat, bien plus que le workflow de candidature
Les difficultés à recruter dans certains secteurs ont fait prendre conscience qu’il fallait faciliter et améliorer l’expérience des postulants. Mais le concept d’expérience candidat a subit un léger glissement selon moi. On est passé de ce que ça devrait être à savoir : la prise en compte de l’ensemble des perceptions des candidats pour améliorer ses interactions avec l’entreprise et rendre sa candidature agréable et mémorable. A ce que c’est aujourd’hui : faire en sorte que la candidature soit fluide.
Gérer la fluidité d’un process c’est bien entendu plus simple et directement actionnable que s’intéresser aux perceptions d’un candidat. Et puis ça tombe bien, la RH tech est des plus florissantes, on trouvera beaucoup d’outils clés en main pour donner de la visibilité au postulant sur l’état de traitement de sa candidature, pour lui faire enregistrer une vidéo de présentation, pour compter et analyser les haussements de sourcils filmés sur ladite vidéo, et bien sûr pour lui permettre de postuler en 3 clics grâce à l’API Linkedin.
Bien que la fluidité de la candidature soit importante, ce n’est pas ce qui permet de qualifier une expérience candidat de "bonne". Tout au plus, elle permet de la qualifier de "normale". Désolée de l’annoncer aussi crûment mais le candidat il trouve que ces fonctionnalités sont le b.a.-ba, des pré-requis de base, manquerait plus que ça un site carrière où il faudrait cliquer 41* fois pour postuler ! (*c’est pourtant la moyenne européenne des sites carrières testés par Easyrecrue dans cette étude).
L’Expérience Candidat, ou l’expérience d’un futur collaborateur
Il faut voir plus large que le process de recrutement, il faut voir plus loin, et considérer que l’expérience collaborateur en interne est le prolongement de l’expérience candidat.
J’ai un mantra que j’assène depuis plusieurs années maintenant, l’expérience collaborateur c’est 3 phases temporelles : avant, pendant et après (à lire ici notamment).
La phase Avant, je la présente comme la phase où le collaborateur n’est pas encore dans les effectifs, il n’est parfois même pas encore candidat. Pour illustrer cela : il y a des entreprises dans lesquelles vous n’avez jamais travaillé, ni même jamais postulé, mais vous avez une "intuition" sur cette entreprise en tant qu’employeur. Cette "intuition" s’est forgée sur la base de ce que vous avez pu entendre de salariés en poste ou partis, de ce que vous avez pu lire sur elle ou voir dans Cash Investigation, percevoir des communications employeur de l’entreprise elle-même ou de ses collaborateurs sur les réseaux sociaux, ou au contact d’un staff dans un point de vente, etc.
Et bien ces perceptions commencent à contribuer à votre expérience avec cette entreprise, et si vous postulez vous les confirmerez (ou pas) lors de l’expérience candidat que vous vivrez, puis lors de votre expérience en tant que collaborateur après l’avoir intégré.
L’Expérience doit être un tout, linéaire et cohérent. Je vois des entreprises dans lesquelles l’expérience candidat est travaillée par une Direction talents, et l’expérience collaborateur par une autre. Je trouve (et c’est un avis qui n’engage bien entendu que moi) que ça parle d’une façon de considérer l’expérience basée sur les process, et qui s’éloigne de son sujet : le candidat/collaborateur.
Considérer l’expérience candidat comme un point d’entrée dans l’expérience collaborateur, revient à considérer les ressentis du candidat, pas uniquement dans son acte de candidature, mais dans l’ensemble de ses interactions avec l’entreprise et ce jusqu’à ce qu’il la quitte, et au-delà !
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