On aurait dû y penser plus tôt !
Certaines choses sont si évidentes qu’on n’imagine même pas qu’elles puissent dysfonctionner…
Depuis la mise en sourdine des économies, les eaux de la lagune de Venise sont redevenues bleu azur. Et l’air de la ville de Wuhan d’où est parti le coronavirus est à nouveau respirable. Le lien entre pollution et économie s’affirme comme incontournable. Mais cette lucidité ne serait-elle pas la blessure la plus proche du soleil[1] ?
L’oxymore et l’incongruence se sont installés durablement !
Dans les temps actuels, notre monde se caractérise par une prolifération de nouvelles immédiates dont l’une chasse l’autre, devenue paradoxale. Et les actions à entreprendre dans la foulée, auront pour mesure un résultat à court terme non relié à une finalité régulatrice des excès en tout genre. Pourtant, des signaux différents nous ont été donnés : des catastrophes climatiques réparties partout sur le globe et des pans entiers de l’écologie verte dévastés par les décisions irraisonnées de dirigeants d’entités tentaculaires ; ou encore, des populations affamées et meurtries qui, à l’autre bout de la terre, ne se donnent pas d’autres choix que de risquer leur vie pour aborder les côtes de l’Europe.
Notre monde est devenu confus. Repérer l’ami de l’ennemi appartient à une alternative hasardeuse non stable dans la durée : la pensée radicale islamiste naît chez nos voisins de palier qu’on considérait être de paisibles jeunes gens. Et les guerres massacrent toujours ceux qui achètent des armes aux états puissants qui les leur vendent, tout en délivrant sur le plan international des messages de paix…
Le monde se dégrade et on ne se sent pas concerné…
La plupart des individus ne se sentent pas directement concernés quand l’image de ces meurtres ou de ces catastrophes leur parvient : ils ne sont pas dans l’image. Une sorte de dissociation de l’esprit et du cœur les amènent à considérer tous ces évènements indépendamment d’eux, ils les objectivisent. Et très vite, ils reviennent à leurs préoccupations : les enfants à mener à l’école, le match de foot du samedi soir ou la promotion au travail. Tout ceci ne les impacte pas personnellement car ils ne se sentent pas touchés directement. Et pourtant…
Notre monde est un monde fini dont la circularité a favorisé les échanges et l’interdépendance internationale. N’a-t-on jamais réfléchi aux paramètres clés, communs à tous, sans lesquels sur terre personne ne peut survivre ?
On a oublié que la santé est un paramètre clé de la vie sur la terre
Les paramètres clés sont les éléments majeurs sans lesquels on ne peut vivre sur notre planète. Parmi eux, l’oxygène dont la quantité minimum est nécessaire pour que chaque individu soit en mesure de respirer tous les jours, y compris dans une ville recouverte par un nuage de pollution. Un autre s’appelle santé ; c’est bien connu, « tant que la santé va tout va ». Dans nos pays civilisés qui ont les moyens de s’exprimer sur la scène mondiale, si on peut vivre sans argent, on ne peut vivre ni sans oxygène ou ni sans une santé suffisante pour se maintenir en vie. Dans les autres pays a fortiori !
On a pensé le système d’échanges internationaux comme peu réactif et adaptatif aux conditions de vie sur la terre. Et en ce qui concerne l’écologie, on a évalué qu’elle pouvait attendre. La planète dispose encore suffisamment de ressources à exploiter et les « prophétesses de mort[2] sont des sottes » ! Quant à la santé, nos institutions dites développées l’ont pensée comme une activité économique comme une autre où l’on pouvait supprimer des lits à l’hôpital ou abaisser le remboursement des dépenses de santé, même si en France déjà en 2018, un tiers de la population renonçait à se soigner, faute d’argent nécessaire[3].
Sur internet ou à la TV on a tous pris connaissance des ravages d’épidémies déclarées dans des pays lointains, et certains ont fait un don à une organisation caritative pour soigner leurs habitants. Comment aurait-on pu imaginer qu’une maladie géographiquement éloignée devienne pandémie, déstabilise nos systèmes économiques au point de faire chuter les indices des bourses mondiales ?
L’effet de seuil de la maladie a été mésestimé
N’a-t-on jamais réfléchi aux impacts sur le plan de la santé de la multiplication des rencontres entre les habitants de toute la planète ? Sans doute que si, mais on a pensé que chaque pays était suffisamment compétent pour arrêter les virus ou les bactéries. Sauf qu’il existe un effet de seuil au-delà duquel on ne peut plus rien maîtriser.
La notion de seuil ne nous est pas inconnue. On y a déjà réfléchi pour l’écologie planétaire sans pour autant le respecter. Les conférences internationales post à celle de Rio (1992) ont repoussé virtuellement les effets des seuils dans le temps, quand les impacts de la dégradation de la terre, eux sont bien réels et ils s’accumulent.
Alors la santé…
La dégringolade des bourses mondiales fut l’indicateur… de santé qui a fait réagir les gouvernants !
Dans la plupart des pays développés, le virus a surpris et la réaction des autorités a déjà pris la forme d’une tactique de terrain, au jour le jour, en fonction des statistiques et des dires d’experts dont la plupart se sont basés sur les éléments sanitaires déjà connus. À ce stade, on ne « croyait » pas à un scénario possible de propagation du virus. Puis, rapidement devant l’ampleur de la contagion, un début de stratégie sanitaire a tenté d’expliquer aux populations les quatre stades du fléau, mais sans mesure contraignante. Aucune politique nationale n’avait intégré la possibilité d’une pandémie mondiale qui dérégule « sérieusement » son économie.
La dégringolade des bourses mondiales fut sans doute l’indicateur qui a provoqué une réaction forte des gouvernants. Aujourd’hui, plusieurs pays européens ont décrété le confinement de leur population qu’un contrôle strict des autorités fait respecter ; d’autres nations ferment leurs frontières ; et d’autres encore ont choisi le non-agir…
La dégradation planétaire de la santé est le symptôme de dysfonctionnement d’une économie mondialisée
La santé non envisagée comme un paramètre clé d’une économie mondialisée est révélatrice de la nature profonde de ses transactions, financière et non tournée vers l’humain. La pandémie mondiale est LE symptôme majeur du dysfonctionnement des échanges internationaux. Sans avoir édifié les limites à ne pas dépasser, l'économique prime depuis trop longtemps sur l’humain.
Lors de la 10ème plaie d’Égypte, la mort des premiers nés a obligé Pharaon à laisser partir les Hébreux d’Égypte. Dès que l'épidémie de coronavirus s’atténuera, (on l’espère !), tout comme Pharaon s’est rétracté et a voulu avec son armée arrêter les Hébreux à la mer Rouge, les dirigeants de ce monde courront-ils à nouveau après le dieu dollar, oubliant les morts et le risque sanitaire en suspension ? Ou orienteront-ils différemment la croissance économique destructrice de la terre, pour sauvegarder des vies, leur vie[4] ?
Les États et les puissants se souviendront-ils qu’un seuil de santé a été atteint, impactant tous les ressorts des économies, mobilité, transport, éducation, production ou travail ? Reviendront-ils aux anciennes tactiques à court terme de régulation des équilibres budgétaires ? Et oublieront-ils que la politique est par essence une vision à long terme, ouverte car mondialisée, qui prenne en compte les paramètres clés de la vie ?
Car si c’est le cas, pour tous, les conditions de la vie sur terre telle qu’on les connaît aujourd’hui, appartiendraient déjà au passé…
[1] Babelio – Citation de René Char – auteur et résistant français
[2] Cette réflexion sur un plan international a visé Greta Thunberg, militante écologiste suédoise engagée dans la lutte contre le réchauffement climatique
[3] Cf. les statistiques de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM)
[4] Selon le patron de l'Agence internationale de l'énergie qui n'est pas réputé pour être un militant écologiste radical « La crise sanitaire est une opportunité historique pour réduire les investissements sales et accélérer la transition énergétique".
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NDLR : Pendant le mois d'août, nous revenons sur quelques uns des articles les plus lus de l'année
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